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Introduction
mercredi 30 mai 2018, par
[p. 1] Entre l’usage imprudent qu’en fit Arthur de La Borderie dans le premier tome de son Histoire de Bretagne [1], aussitôt dénoncé par Ferdinand Lot [2], et l’appréciation aussi négative que définitive qu’en donnait François Duine [3], le dossier hagiographique mélarien mérite certainement un réexamen, d’autant plus que René Largillière, Denis-Bernard Grémont et Louis Pape, dans leurs travaux successifs sur saint Melar [4], n’ont pas procédé à une telle démarche, se contentant d’étayer leurs très intéressantes conclusions sur les éditions anciennes, partielles et fallacieuses des pièces littéraires de ce dossier données par Dom Morice et par Dom Plaine [5], sinon même sur le seul récit tardif d’Albert Le Grand [6].
Un résumé de l’histoire de saint Melar [7]
Meliau, roi de Cornouaille armoricaine, monarque vertueux et aimé de Dieu, est assassiné par son frère Rivod, lequel, pour asseoir définitivement son pouvoir, veut également supprimer Melar, âgé de sept ans, le fils et l’héritier de Meliau ; mais, suite aux prières des membres de sa cour, Rivod se contente dans un premier temps de faire mutiler Melar pour le rendre inapte aux fonctions de chef de guerre. L’enfant est alors conduit dans un monastère où il demeure sept années. Rivod, ayant appris, à la suite de petits miracles opérés par Melar, que la main d’argent et le pied de bronze, appliqués à son neveu en remplacement de ses membres coupés, étaient [p. 2] aussi efficaces que s’ils eussent été naturels, corrompt le gouverneur (nutritor ou nutritius) du jeune prince, Kerialtan, en promettant à ce dernier de lui donner tout ce qu‘il pourra apercevoir du haut du mont Frugy, à Quimper, s’il accepte de tuer Melar, alors sous la protection de l’évêque de Cornouaille.
Consultée, la femme de Kerialtan, qui feint d’être intéressée par la proposition, conseille à son mari de retourner auprès de Rivod pour obtenir de lui l’accord le plus avantageux et profite de cette diversion pour s’enfuir en Domnonée (région septentrionale de la péninsule) avec le jeune prince, lequel ignore ce qui se trame contre lui ; les fugitifs viennent se placer sous la protection du comte Commor. Commor et sa femme, la tante paternelle de Melar, demeurent dans un château appelé Beuzit (Boxidus) en l’actuelle commune finistérienne de Lanmeur. Malgré tous les soins apportés à sa sécurité par sa famille d’accueil, Melar est rejoint dans son refuge par les séides de Rivod, Kerialtan et le fils de ce dernier, Justan, qu’il accueille avec des transports de joie et qui néanmoins l’assassinent puis le décapitent.
En s’enfuyant du château la nuit du crime, Justan fait une chute et se tue ; emportant la tête du saint, Kerialtan se lance alors dans une course éperdue vers Quimper. A un moment, comme il va mourir de soif, l’intervention miraculeuse du petit martyr, décidément peu rancunier, fait jaillir une source où Kerialtan peut se désaltérer. Finalement le nutritor dénaturé apporte à Rivod la tête de Melar et touche la récompense promise pour l’accomplissement de son forfait. Mais il est frappé par la justice Divine qui l’aveugle et le fait mourir à l’instant même. Pendant ce temps, Commor et sa femme ont fait inhumer le corps martyrisé de Melar successivement dans leur château, puis dans une église qui n’est pas nommée (ad quamdam ecclesiam), enfin à Guimaëc (in locum qui dicitur vicus Maioci), commune de l’actuel canton de Lanmeur ; mais à chaque fois, on retrouve le tombeau déserté par son occupant. Alors, un endroit désigné miraculeusement par le saint lui-même, dont le corps avait été disposé sur un chariot tiré par des taureaux que nul ne guidait, accueille définitivement la sépulture du jeune prince. Quant à Rivod, il est lui aussi privé de la vie, le troisième jour après que Kerialtan lui eut apporté la tête de saint Melar.
Ce précieux objet, apporté comme on l’a dit en Cornouaille, n’avait pas ensuite été ramené auprès du corps martyrisé ; et cela constituait la cause d’un désaccord permanent entre les habitants de cette contrée et ceux de la Domnonée qui réclamaient de récupérer la relique. Après de nombreuses années, les chefs politiques et religieux des deux comtés (consulatus) s’accordèrent pour apporter, à l’occasion d’une rencontre sur leur frontière même, dans les monts d’Arrée, le corps et la tête de saint Melar, lesquels furent placés à quelque distance l’un [p. 3] de l’autre. Alors, après le jeûne de trois jours d’une grande assemblée de fidèles en prière, sous le regard de ceux-ci, la tête vint d’elle même et sans aide aucune rejoindre le corps ; par quoi on en conclut que l’un et l’autre devaient être désormais inhumés en terre domnonéenne, au lieu même de la sépulture qui avait été celle du seul corps du petit martyr. Ce qui fut fait.
Quant à l’endroit où avait eu lieu le miracle favorable aux Domnonéens, il fut consacré par la construction d’un oratoire en l’honneur de saint Melar ; mais ce qui était devenu un lieu de culte très renommé et attirait de nombreux pèlerins fut victime de son succès. Ceux qui possédaient par droit héréditaire le bien-fonds de l’endroit pillèrent les nombreuses offrandes et perturbèrent les assemblées de pèlerins qui se tenaient là. L’oratoire tomba en ruine et le souvenir de saint Melar n’était plus désormais conservé en ce lieu que par deux pieux fichés en terre là où l’on avait posé le corps et la tête du martyr.
Pour une approche renouvelée de l’hagiographie mélarienne
Au delà des aspects miraculeux, au demeurant assez peu développés, sur lesquels notre réflexion d’historien vient buter régulièrement, sans réelle intention d’ailleurs d’en percer le mystère récurrent, suffit-il donc, suivant l’exemple déjà ancien de Dom Lobineau, de supprimer ces éléments surnaturels pour parvenir à distinguer la réalité historique derrière les aspects légendaires de l’histoire de saint Mélar [8] ; ou bien faut-il admettre que l’existence même du personnage ne peut être prouvée et que tous les détails de sa biographie sont empruntés au « folklore » et aux « pseudo-généalogies celtiques » comme l’écrivait F. Duine ? Les érudits et historiens de la fin du XIXe siècle, Dom F. Plaine, le vicomte H. Le Gouvello, A. de La Borderie lui-même, considéraient le dossier hagiographique mélarien comme un précieux témoignage sur l’histoire de la Bretagne armoricaine au haut Moyen Age. Au contraire, les savants ’hypercritiques’ du début du XXe siècle (F. Lot, A. Oheix, etc) ont généralement conclu, après avoir souligné combien ce dossier était fabuleux et empruntait à la mythologie celtique, que son résidu historique était négligeable. A n’en pas douter, les recherches relatives à saint Melar doivent enfin sortir de ce dilemme si elles veulent contribuer efficacement à enrichir le débat en cours sur les différentes possibilités d’utilisation des sources hagiographiques [9] ; c’est pourquoi, sans renoncer à opérer la distinction entre possibles aspects [p. 4] historiques et patents aspects légendaires de la tradition mélarienne, nous avons surtout privilégié une approche historiographique de ce dossier en nous intéressant moins à l’histoire du saint qu’à ‘l’histoire de son histoire’.
Les études mélariennes dans le contexte des recherches actuelles sur l’hagiographie bretonne armoricaine.
Ce réexamen du dossier de saint Melar, avec notamment un essai d’évaluation des différentes pièces littéraires qu’il contient (datation, circonstances de leur composition, sources, etc), est d’autant plus nécessaire que, si les textes hagiographiques constituent une part importante du corpus documentaire écrit transmis par le Moyen Age, leur utilisation et leur exploitation continuent souvent de poser à l’historien d’insolubles problèmes méthodologiques, eux-mêmes perturbés par l’approche passionnée sinon passionnelle de questions historiques sensibles. L’exemple de la Bretagne, dont personne ne songerait d’ailleurs à nier la spécificité en matière de production hagiographique [10], est à cet égard assez frappant. On sait les débats auxquels ont donné lieu, depuis près d’un siècle et demi, l’appréciation divergente portée sur les sources hagiographiques bretonnes armoricaines. A partir des années soixante-dix de notre siècle et à la suite de l’article précurseur de Pierre Riché [11], de nombreux chercheurs et historiens de la Bretagne vont entreprendre un nouvel effort de critique des sources hagiographiques, démarche jalonnée entre autres par les travaux synthétiques de Léon Fleuriot [12], Gildas Bernier [13], André Chédeville [14] et Bernard Merdrignac [15]. Dans le même temps [p. 5] deux élèves de L. Fleuriot, Gwenaël Le Duc et Claude Sterckx, complétaient l’édition partielle qu’avait donnée A. de La Borderie de la vita de saint Goëznou [16] ; D.-B. Grémont publiait ce qu’il présentait comme une vita inédite de saint Melar [17] ; le dossier hagiographique samsonien faisait l’objet d’un réexamen attentif et avisé de la part de deux chercheurs chevronnés, travail partiel chez Hubert Guillotel [18], travail exhaustif chez Joseph-Claude Poulin [19] qui étendait ses investigations aux dossiers des saints Magloire, Malo et Conwoion [20] ; Gw. Le Duc récidivait en donnant cette fois la vita de saint Malo par le diacre Bili dans son texte latin confronté à un texte en anglo-saxon, le tout accessible grâce à une traduction en français [21] ; H. Guillotel s’intéressait à la translatio de saint Magloire dont il procurait une édition critique [22] et examinait la tradition des Vies de saint Guénolé [23] ; etc... Cette première étape d’un véritable risorgimento des études hagiographiques bretonnes [24] culmine avec le colloque organisé en 1985 à l’abbaye de Landévennec sur le thème Landévennec et le monachisme breton dans le haut Moyen Age dont les Actes ont paru l’année suivante.
[p. 6] Au lendemain de ce « colloque important » [25] est fondé le Centre international de recherche et de documentation sur le monachisme celtique (CIRDoMoC) qui reprend l’initiative de Jean-Luc Deuffic d’une revue spécifique à ces questions d’histoire monastique et d’hagiographie bretonnes [26] ; et qui surtout organise, à partir de l’été 1988, toujours à l’abbaye de Landévennec, une journée annuelle d’études sur un thème défini : ainsi est rendu possible l’échange entre les universitaires, les chercheurs du CNRS et ceux dont l’activité de recherche historique n’entre pas dans le cadre de l’Université ou dans celui des différentes unités de la recherche scientifique publique [27]. Nombre de travaux publiés depuis les dernières années sont plus ou moins le reflet des préoccupations apparues à l’occasion de ces mini-colloques : ainsi le P. Joseph Irien a-t-il édité, dans la collection bilingue qu’il a créée [28], des monographies relatives à tel ou tel saint breton dont les modèles du genre sont certainement celles consacrées à saint Hervé [29] et à saint Paul Aurélien [30] ; B. Tanguy qui a assuré l’essentiel de ces deux monographies est par ailleurs l’auteur de travaux de synthèse sur la géographie paroissiale des actuels départements du Finistère [31] et des Côtes-d’Armor [32] où l’importance donnée à la critique et à l’utilisation des sources hagiographiques est considérable. Ainsi en est-il également de l’ouvrage d’Erwan Vallerie sur un sujet proche [33].
Pour autant ce foisonnement et ces échanges parfois animés ne doivent pas nous faire perdre de vue deux faits : premièrement, les éditions scientifiques de textes hagiographiques [p. 7] bretons, avec l’ensemble des outils qui rendent possible leur utilisation, demeurent rares [34] ; deuxièmement et conséquemment, cet état de la documentation impose à la recherche sur la matière de Bretagne, en particulier sur l’histoire du Moyen Age breton, des limites que transgressent parfois certains auteurs : si la controverse renaît alors, c’est le plus souvent en pure perte puisque les hypothèses discutées ont été développées à partir d’une base documentaire qui n’est pas suffisamment fiable [35].
Le dossier hagiographique mélarien, que nous avons choisi de traiter dans une perspective résolument historiographique, ne constitue qu’un élément du vaste corpus hagiographique breton : ses ‘dimensions’ modestes, mieux accordées à nos capacités d’autodidacte, nous en assuraient la relative maîtrise, ce qui constituait, en même temps que l’intérêt éprouvé pour le culte du saint lui-même, un argument qui a évidemment compté dans le choix de ce dossier et de son traitement.
La présentation de notre travail est volontairement redondante : c’est ainsi que l’on trouvera dans une première partie, en introduction à l’édition du dossier littéraire de saint Melar, un chapitre qui répertorie les éléments du dossier en question : ces pages seront utiles, croyons nous, au lecteur pressé d’aller à la seule édition des textes ; mais, tout en manquant de la précision souhaitée par un lecteur plus exigeant, il faut constater qu’elles déflorent un peu pour ce dernier les commentaires que nous avons développés en deuxième partie.
Nous avons surtout cherché à expliquer, dans ces commentaires, comment — au delà de saint Melar — le dossier hagiographique mélarien, jusqu’alors insuffisamment et/ou plus moins fallacieusement traité, s’était progressivement constitué, dans quel contexte et par quels opérateurs : la part belle, trop belle sans doute, faite à cette occasion aux hypothèses et aux approches personnelles n’a pas dissuadé ceux qui nous avaient honoré de leur confiance de continuer à nous apporter leur soutien critique en même temps qu’amical. Nous souhaitons [p. 8] ainsi remercier vivement Monsieur Jean-Loup Lemaître, qui a encadré notre travail à la IVe section de l’École pratique des Hautes Études (ÉPHÉ), Monsieur François Dolbeau et Monsieur Pierre Flobert, qui ont été en ce lieu les deux rapporteurs de notre thèse ; ainsi que Monsieur Yves-François Riou, de l’Institut de recherche et d’histoire des textes, qui fut l’initiateur de notre démarche à la IVe section de l’ÉPHÉ. Nous remercions également tous nos amis du CIRDoMoC, en particulier Dom Marc Simon, OSB, de l’abbaye Saint-Guénolé de Landévennec, Monsieur Bernard Tanguy, du Centre de recherche bretonne et celtique (Brest), et Monsieur Gwenaël Le Duc, professeur à l’Université de Rennes 2. Nous remercions enfin le CIRDoMoC d’avoir accepté la publication de notre thèse dans sa collection Britannia Monastica et « Les amis du patrimoine de Melar, prince et saint breton » (Lanmeur) d’avoir permis sur le plan matériel cette publication ; un remerciement plus particulier à Monsieur François Ruellou, auteur des cartes géographiques qui figurent dans le présent ouvrage [36].
[p. 9]
AA. SS = Acta Sanctorum.
Anal. Boll.= Analecta Bollandiana.
AB(PO) = Annales de Bretagne (et des Pays de l’Ouest).
BBCS = Bulletin of the Board of Celtic Studies.
BCLL = Bibliography of Celtic-Latin Literature.
BEC = Bibliothèque de l’École des chartes.
BHL = Bibliotheca hagiographica latina.
BSAF = Bulletin de la Société archéologique du Finistère.
CCM = Cahiers de civilisation médiévale.
CR = compte rendu.
EC = Études celtiques.
ms. = manuscrit (mss = manuscrits).
MSAIV = Mémoires de la Société archéologique d’Ille-et-Vilaine.
MSECDN = Mémoires de la Société d’émulation des Côtes-du-Nord.
MSHAB = Mémoires de la Société d’histoire et d’archéologie de Bretagne.
RC = Revue celtique.
[1] A. de La Borderie, Histoire de Bretagne, t. 1, Rennes, 1896, p. 373-403.
[2] F. Lot, Mélanges d’histoire bretonne, Paris, 1907, p. 123, n. 2 : « M. de La Borderie (I, 376, 378, 401-403) a l’air de prendre pour parole d’Evangile la Vita Melorii ...(...) ».
[3] F. Duine, Memento des sources hagiographiques de l’histoire de Bretagne, Rennes, 1918, p. 99-100 : « La Vita Melori est une fable, tissée de folklore et de pseudo-généalogies celtiques, dans le goût des romans hagiographiques du XIe et du XIIe siècles. ».
[4] R. Largillière, « Essay on the Cult of S. Melor », dans Doble (G.H.), Saint Melor, Patron of Mylor and Linkinhorne and of Amesbury (Wilts), Shipston-on-Stour, 1927, p. 32-51 ; D.-B. Grémont, « Recherches sur saint Mélar, Mélor ou Méloir », dans Bulletin de la Société archéologique du Finistère, t. 101 (1973), p. 285-361 ; L. Pape, Les saints bretons, Rennes, 1981 [p. 63-70 : « Saint Mélar ou les difficultés de l’historien »].
[5] Dom H. Morice, Mémoires pour servir de preuves à l’histoire ecclésiastique et civile de Bretagne, t. 1, Rennes, 1742 [col. 223-225 : « Extraits des actes de saint Melair »] ; Dom F. Plaine, « Vita inedita S. Melori martyris in Britannia minori », dans Analecta Bollandiana, t. 5 (1886), p. 165-176.
[6] A. Le Grand, Vies des saints de la Bretagne armorique, 5e éd., Quimper-Paris-Brest, 1901, p. 487-496.
[7] Ce résumé est fait d’après les différents éléments du dossier littéraire de saint Melar. Comme dans la traduction des principales pièces de ce dossier proposée plus bas, les noms propres sont donnés sous leur forme actuelle la plus usitée.
[8] Dom G.-A. Lobineau, Les Vies des saints de Bretagne, Rennes, 1725, col. 61-63.
[9] Comme l’a réaffirmé récemment B. Merdrignac à propos des aspects folkloriques de la Vie latine de saint Ronan, dans un article paru dans Saint Ronan et la Troménie. Actes du colloque international 28-30 avril 1989, s.l. [Locronan], 1995, p. 129, « le fait de reconnaître la présence de ce substrat folklorique dans la Vita Ronani n’implique donc pas qu’il faille renoncer à y rechercher des renseignements sur la personnalité historique de saint Ronan ».
[10] Ainsi il paraît logique aux initiateurs de l’entreprise collective « Sources hagiographiques de la Gaule », « de traiter la Bretagne d’un seul bloc », à l’occasion de la constitution des différentes ’provinces hagiographiques’ de la Gaule : cf. F. Dolbeau, M. Heinzelmann et J.-C. Poulin, « Les sources hagiographiques narratives composées en Gaule avant l’An Mil (SHG). Inventaire, examen critique, datation », dans Francia, t. 15 (1987), p. 705.
[11] « Les hagiographes bretons et la Renaissance carolingienne », dans Bulletin philologique et historique (1966), p. 651-659.
[12] L. Fleuriot, Les origines de la Bretagne, 2e éd., Paris, 1982 ; la première édition de cet ouvrage est de 1980. Un CR en a paru dans les Mémoires de la Société d’histoire et d’archéologie de Bretagne, t. 58 (1981), p. 350-357, sous la plume de H. Guillotel qui souligne (p. 356) : « de façon générale, l’accueil indulgent accordé à certains témoignages hagiographiques pourra surprendre » ; preuve que l’appréciation de la qualité de matériau historique des sources hagiographiques demeure sujet de débat.
[13] G. Bernier, Les chrétientés bretonnes continentales, s.l., 1982 (Dossiers du Centre régional archéologique d’Alet, E).
[14] A. Chédeville, « La Bretagne du Ve au VIIIe siècle », dans Chédeville (A.) et Guillotel (H.), La Bretagne des saints et des rois Ve -Xe siècle, s.l. [Rennes], 1984. L’avant-propos, p. 13-18, intitulé « L’histoire et ses sources », exprime sur la production hagiographique bretonne des vues qualifiées « très sages » par L. Fleuriot à l’occasion de son CR de cet ouvrage dans les MSHAB, t. 62 (1985), p. 573-579. Ces « vues très sages » sont déclarées telles parce qu’elles prennent justement en compte la revalorisation historiographique des sources hagiographiques préconisée par L. Fleuriot et ses élèves.
[15] B. Merdrignac, Recherches sur l’hagiographie armoricaine du VIIe au XVe siècle, t. 1, s.l., 1985 ; t. 2, s.l., 1986 (Dossiers du Centre régional archéologique d’Alet, H et I).
[16] C. Sterckx et Gw. Le Duc, « Les fragments inédits de la Vie de saint Goëznou » dans Annales de Bretagne, t. 78 (1971), p. 277-285. Voir le CR de H. Guillotel signalé à la n. 12, en particulier p. 355-356 où renaît la controverse sur la date de composition de cette vita ; voir également A.-Y. Bourgès, « Guillaume le Breton et l’hagiographie bretonne aux XIIe-XIIIe siècles », dans Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest, t. 101 (1995), p. 35-45, en particulier p. 36-39.
[17] D.-B. Grémont, « Recherches sur saint Mélar... » ; l’édition de ce texte occupe les p. 347-354.
[18] Dans son article sur « Les origines du ressort de l’évêché de Dol », dans les MSHAB, t. 54 (1977), p. 31-68, voir en particulier p. 42-55.
[19] « Hagiographie et politique : la première Vie de saint Samson de Dol », dans Francia, t. 5 (1977), p. 1-26 ; « A propos du diocèse de Dol : saint Samson et la question des enclaves », dans Francia, t. 6 (1978), p. 610-615 (réaction à l’article de H. Guillotel mentionné dans la n. précédente) ; « Le dossier de saint Samson de Dol », dans Francia, t. 15 (1987), p. 715-731. — La controverse sur la date de composition de la Vita Ia Samsonis s’est poursuivie avec deux articles parus dans les Mélanges offerts à la mémoire de Léon Fleuriot : « Le témoignage du rédacteur de la Vie ancienne de saint Samson sur sa date relative » par P. Flobert, p. 161-166, qui conclut à une datation médiane (début VIIIe siècle) ; « Henoc, les philosophi et Pental : remarques sur la Vita Ia Samsonis » par B. Merdrignac, p. 167-180, qui paraît toujours incliner pour une datation haute (VIIe siècle) et conclut que la controverse se poursuivra au moins « jusqu’à ce que l’on dispose d’une édition critique de la Vita Ia plus fiable que celle de R. Fawtier », en l’occurrence celle que doit procurer incessamment P. Flobert.
[20] « Les dossiers de S. Magloire de Dol et de S. Malo d’Alet (Province de Bretagne) », dans Francia, t. 17 (1990), p. 159-209 ; « Le dossier hagiographique de saint Conwoion de Redon », dans Francia, t. 18 (1991), p. 139-159.
[21] Gw. Le Duc, Vie de saint Malo, évêque d’Alet. Version écrite par le diacre Bili (fin du IXe siècle). Textes latin et anglo-saxon avec traductions françaises, s.l., 1979 (Dossiers du Centre régional archéologique d’Alet, B). Voir CR par F. Dolbeau dans Anal. Boll. t. 101 (1983), p. 194-196.
[22] H. Guillotel, « L’exode du clergé breton devant les invasions scandinaves » dans les MSHAB, t. 59 (1982), p. 269-315. L’édition de la translatio en question occupe les pages 301-315.
[23] Dans Landévennec et le monachisme breton dans le haut Moyen Age. Actes du colloque du XVe centenaire de l’abbaye de Landévennec 25-26-27 Avril 1985, s.l.[Landévennec], 1986, p. 97-114.
[24] Souligné par J.-C. Poulin, « Recherches et identification des sources de la littérature hagiographique du haut Moyen Age : l’exemple breton », dans Revue d’histoire de l’Église de France, t. 71 (1985), p. 119.
[25] Appréciation par J.-C. Poulin, « Travaux en cours sur l’hagiographie de Bretagne armoricaine avant l’An Mil », dans Francia, t. 14 (1986), p. 512.
[26] La revue fondée et dirigée par J.-L. Deuffic s’intitulait Britannia Christiana ; sa publication interrompue après quelques numéros a laissé la place à Britannia monastica, ’collection’ plutôt que ’revue’ à proprement parler car ses publications sont « de taille et de prix variables ».
[27] En 1988, Irlandais et bretons dans l’Europe du haut Moyen Age, avec des interventions de D. Laurent, P.-Y. Lambert, B. Merdrignac et P. Guigon ; en 1989, Les débuts de l’organisation ecclésiastique en Bretagne, avec des interventions de G. Bernier, E. Vallerie, P. Guigon, H. Guillotel et B. Tanguy ; en 1990, Les influences extérieures sur la Vie spirituelle et culturelle en Bretagne au haut Moyen Age, avec des interventions de G. Bernier, J. Holstein, L. Lemoine et J. Irien ; en 1991, La fondation des évêchés bretons, légende et histoire, avec des interventions de J.-M. Picard, Gw. Le Duc, L. Langouet ; en 1992, Les Vies de saints bretons, avec des interventions de J.-Y. Le Moing, M. Duval, P. Martin, H. Le Bourdellès ; en 1993, Les Vies de saints bretons (suite), avec des communications de Gw. Le Duc, A.-Y. Bourgès, B. Félix, Y.-F. Riou et B. Merdrignac (pour le compte de A. Courtenais) ; en 1994, Les saints bretons et le pouvoir politique et les Vies de saints bretons (suite), avec des communications de J.-C. Cassard, N.-Y. Tonnerre, P. Guigon, L. Herry, G. Vallerie ; en 1995, Hagiographie bretonne et mythologie et les Vies de saints bretons (suite), avec des communications de Gw. Le Duc, C. Sterckx, M. Duval, M. Debary, A.-Y. Bourgès, H. Pettiau.
[28] Buhez ar zent, nom emprunté aux anciens ouvrages d’édification religieuse en langue bretonne.
[29] B. Tanguy, Saint Hervé. Vie et culte, s.l. [Tréflévénez], 1990 (Buhez ar Zent).
[30] B. Tanguy, J. an Irien, S. Falhun et Y.-P. Castel, Saint Paul Aurélien. Vie et culte, s.l. [Tréflévénez], 1992 (Buhez ar Zent).
[31] B. Tanguy, Dictionnaire des noms de communes, trêves et paroisses du Finistère, s.l. [Douarnenez], 1990.
[32] B. Tanguy, Dictionnaire des noms de communes, trêves et paroisses des Côtes-d’Armor, s.l. [Douarnenez], 1992.
[33] Communes bretonnes et paroisses d’Armorique, s.l. [Brasparts], 1986 (Les Bibliophiles de Bretagne, 5).
[34] B. Merdrignac, Recherches sur l’hagiographie armoricaine..., t. 1, p. 21, souligne qu’il faut « déplorer la quasi-totale absence d’éditions définitives...(...) » — L’examen des sources imprimées de son propre travail révèle que pour les cinquante-trois saints dont il a consulté les dossiers hagiographiques, quarante-deux de ces dossiers sont formés d’éditions antérieures, parfois très largement, à 1918 ; et sept d’éditions antérieures à 1945. Seulement quatre dossiers contiennent des éléments postérieurs à 1945 : Goëznou [voir supra n. 16], Malo [voir supra n. 21], Melaine [F. Dolbeau : « Fragments métriques consacrés à saint Melaine de Rennes », dans Anal. Boll., t. 93 (1975), p. 121-125] et Melar [voir supra n. 17]. — Il y aurait heureusement des retouches à apporter à ce tableau : ainsi B. Merdrignac, avec A. Carrée, a lui-même publié depuis, en 1991, La Vie latine de saint Lunaire.
[35] B. Merdrignac, Recherches sur l’hagiographie armoricaine..., t. 1, p. 21, rappelle l’exemple célèbre de la civitas Corisopitensis, lequel montre les limites imposées à la recherche historique par l’état de la documentation hagiographique, et en particulier par les éditions disponibles.
[36] Entre la première version de notre travail, celle qui fut ensuite présentée pour l’obtention du diplôme de l’École pratique des Hautes Études et celle que nous publions aujourd’hui, nous avons procédé à de nombreuses petites rectifications formelles, souvent préconisées par les différents maîtres que nous avons cités. Sur le fond, en revanche, notre thèse n’a pratiquement pas évolué, sinon sur deux points.
Ainsi nous avons été amené à modifier notre opinion sur l’identité de l’auteur de la *vita Ia : au lieu de reconnaître en lui un lanmeurien d’origine, ou au moins d’adoption, et un vraisemblable moine de Saint-Jacut-de-l’Isle, abbaye dont dépendait le prieuré de Kernitron à Lanmeur, nous avons abouti à la conclusion qu’il pouvait s’agir d’Omnes, évêque de [Saint-Pol-de-]Léon dans la seconde moitié du XIe siècle, dont l’oeuvre hagiographique mélarienne aurait donc été en partie composée précisément pour s’opposer aux prétentions de Kernitron à posséder les reliques de saint Melar. Cette opinion résulte d’une réflexion initiée par Monsieur Lemaître quand il nous interrogea sur l’endroit où avait pu être composée la *vita Ia : dans le scriptorium d’un monastère ou dans un palais épiscopal, sinon à l’ombre des murs de celui-ci, au sein du collège canonial ? A l’époque de composition de la vita Ia, il n’y avait aucun monastère digne de ce nom à proximité de Lanmeur et le seul sur toute la côte nord de la péninsule bretonne est effectivement celui de Saint-Jacut ; mais en ce lieu même le culte de saint Melar paraît tardif, postérieur en tout cas à 1163 et n’a pas connu de succès marqué et durable, ce qui s’accorde mal avec une composition hagiographique par un moine dépendant de cette abbaye. A l’inverse l’origine géographique d’Omnes, son appartenance à la cour comtale de Cornouaille avant son élévation à l’épiscopat de Léon, l’intérêt des prélats qui occupaient ce dernier siège pour la partie la plus occidentale du diocèse de Tréguier, avec notamment le domaine de Lanmeur disputé entre les deux évêques voisins (sans compter celui de Dol) — tout s’accorde assez bien avec ce que nous avons dit des circonstances de la composition de la *vita Ia de saint Melar. Cette dernière peut donc être rangée avec assez de vraisemblance dans la catégorie des vitae ‘épiscopales’.
Le deuxième point est relatif à la différenciation qu’il convient de faire entre la *vita Ia de Melar proprement dite et son appendix qui relate la réunion miraculeuse des reliques du saint : ces deux textes, pour être sans doute effectivement sortis de la plume du même auteur, comme nous le suggérions en les rangeant sous la désignation unique de *vita Ia, n’en ont pas moins une portée liturgique distincte, — quand bien même il est très probable qu’ils furent longtemps conservés ensemble ainsi qu’en témoigne l’abrégé procuré par Jean de Tynemouth. C’est là l’opinion de Monsieur Dolbeau à laquelle nous nous rangeons désormais.